Cet article met à l’honneur un artiste qui, depuis bien longtemps, fait parler son cœur à travers sa musique pour toucher le notre, de cœur. Si son nom ne vous dit rien, vous connaissez forcément certaines de ses chansons. Mais si, forcément. C'est parti pour la Story de Randy Newman
Randall Newman naît le 28 novembre 1943 à Los Angeles, mais il passera toute sa jeunesse à la Nouvelle-Orléans. C’est là-bas qu’il chope le virus de la musique, surtout du jazz. D’ailleurs, sa famille a déjà un sacré passé musical, puisque deux de ses oncles sont compositeurs de musiques de films (retenez ça, on en reparlera plus tard) et l’un deux est même le créateur du générique de la 20th Century Fox. Eh oui, le fameux "Tadadadaaa tatatatatataaa", c’est Alfred Newman !
A 20 ans, de retour à L.A, Randy commence sa carrière avec le groupe Harpers Bizarre. En 1968 sort son premier album solo nommé très simplement Randy Newman. Cet album pose déjà très bien les bases de ce que fera Newman durant le reste de sa carrière : des mélodies simples, avec guitare et piano, parfois accompagnées de violons. Tantôt joyeux, tantôt mélancoliques, les textes parlent de son enfance, de la bonne vieille campagne américaine et bien sur des amours. Tout cela est agrémenté d’une vibe très jazz, évidemment, et d’une façon de chanter qui rappelle beaucoup le Sud des USA et tout particulièrement la culture afro-américaine. Les chansons les plus belles de cet album sont aussi les deux plus mélancoliques : So Long Dad, mais surtout I Think it Going To Rain Today. Le violon est tout simplement magistral, voilà. L’album fait un bide commercial plutôt monumental, mais d’autres artistes et producteurs du milieu ont assez apprécié, et lui donnent donc une seconde chance en 1970 avec l’album 12 Songs.
Toujours autant de simplicité dans les titres de disques, et aussi dans sa musique. C’est de là que vient sa beauté. J’en retiens la douce Yellow Man et la très country Old Kentucky Home (je case ça là, mais j’aime bien la country, voilà). La même année, Newman enregistre un album avec un artiste qu’on apprécie énormément ici et sur lequel nous avons déjà écrit : Harry Nilsson ! Les deux se retrouvent dans un opus qui encore une fois porte bien son nom (décidement, c’était la mode à l’époque), Nilsson Sings Newman. Même si il aurait pu s’appeler Nilsson Sings Newman With Newman Playing The Piano. Randy compose aussi Have You Seen My Baby pour l’album Ringo de Ringo Starr. Peu après, en 1973, Newman sort Sail Away, qui s’ouvre sur le morceau du même nom : derrière ses paroles très patriotes, le message est en vérité très beau et très pacifiste. La troisième chanson du disque, c’est He Gives Us All His Love, la plus belle chanson de l’album,a égalité avec Old Man. La première parle de la difficulté mais surtout la beauté d’être un père et la seconde se développe autour de la vieillesse et de la mort. Political Science, elle, a des paroles qui valent vraiment l’écoute, puisqu’elles sont tristement toujours aussi vraies aujourd’hui. Elle exprime d’abord le point de vue d’un américain qui méprise les étrangers, et puis d’un étranger qui comprend pas pourquoi il est tant haï. C’est finalement un complément à Sail Away. En somme, ce troisième album est une pépite que je vous conseille fortement d’écouter.
2 ans plus tard, c’est au tour du génial Good Old Boys et sa superbe pochette de voir le jour. On retrouve la satirique Rednecks ou l’engagée Mr. President, visant la politique intraitable du président Richard Nixon. Après la douce-amère Louisiana 1927, l’album se clôture en douceur avec Rollin’ qui nous fait part du simple plaisir de boire du whisky et laisser ses problèmes de côté. Commercialement, encore un succès en atteignant le Top 50 aux Etats-UNis. En 77, Little Criminals : c'est un beau témoignage de la mélancolie de l’Amérique profonde, avec notamment Texas Girl At The Funeral Of Her Father, mais j’en retiens surtout la véritablement poignante Old Man On The Farm. Ce qui est bien avec Newman, c’est qu’il n’y a pas à décrire de quoi parle la musique, puisque le titre le fait très bien tout seul.
Cela dit, si on ne devait garder qu’un titre de cet album, ce serait Baltimore. Des paroles qui décrivent la ville, un mélodie entêtante au piano, une guitare qui se balade par-ci par là... Jusqu’ici Newman fait vraiment du Newman, mais ça ne se renouvelle pas beaucoup. C’est en 1979 que l’on va commencer à ressentir un changement dans sa musique et dans ses paroles : c’est l’album qui porte bien son nom, Born Again. Ce changement, on le constate surtout sur des morceaux tels que le très joyeux The Story Of Rock And Roll Band, une sorte d’hommage a un des groupes favoris de Newman, Electric Light Orchestra. C’est sur tout l’album que l’on découvre cet étrange mélange entre le Newman Style et l’influence du groupe anglais. Malheureusement, le résultat n’est pas vraiment à la hauteur (de toute façon, tout ce qui est born again, ça ne marche pas. Regardez avec Bob Dylan, par exemple !) : ce n’est pas catastrophique, mais il a voulu essayer autre chose et ça n’a pas trop marché. C’est sur Trouble In Paradise qu’il commence à maîtriser la musique qui fait l’identité de cette fabuleuse période qu’était le début des années 80. La relativement célèbre I Love L.A ouvre l’album avec un concert de synthétiseurs ensoleillés et de choeurs, accompagnés de guitare électrique pour muscler un peu tout ça. Au final, ce disque représente très bien l’image que l’on se fait de la cité des anges.
Mais revenons un peu en arrière, en 1981. C’est là que commence un tournant dans la carrière de Newman. Grâce à son expérience du monde du cinéma léguée par ses oncles, Randy se voit proposer de faire la musique du film Ragtime de Milos Forman. À partir de là, il composera des musiques de film et de séries télévisées, en parallèle de sa carrière solo. En 1995, on lui demande d’enregistrer la bande originale du premier long-métrage des jeunes studios Pixar, sobrement intitulé Toy Story. Vous voyez où je veux en venir... Newman écrit la chanson You’ve Got a Friend in Me.
Cette super chanson est vraiment indissociable du film et devient une sorte de classique des bandes originales. Mais il a aussi créé toutes les mélodies du film, les violons qui sublime les voltiges de Buzz ou les trompettes qui donne un coté western à la course-poursuite de fin. Ce premier film marquera une longue et fructueuse collaboration entre Pixar et Newman. Il composer bien évidemment la musique du second opus, et il remporte un oscar en 2002 pour la musique de Monstres & Compagnie. Dans un autre registre, il créera aussi la musique de la comédie dramatique Netflix The Meyerowitz Story, réalisé par Noah Baumbach avec entre autres Ben Stiller. Ensuite, ce sera au tour de Cars 3 et Toy Story 4, mais sa dernière composition en date, toujours pour Baumbach, c’est les envolées mélodiques du superbe Marriage Story. Sa musique complète parfaitement l’histoire de ce couple qui sombre tout doucement vers le divorce, encore une preuve que Newman a un don pour les thèmes touchants. Il y a une symbiose folle entre l’histoire, les prestations des acteurs et la musique. Une pépite Netflix (eh oui, comme quoi...) dont les compositions aurait bien plus mérité l’Oscar que celles du Joker...
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